Le syndrome de Diogène est une forme de trouble comportemental associant une tendance à l’accumulation d’objets (la syllogomanie), une négligence de l’hygiène corporelle et domestique et, le plus souvent, un isolement social prononcé sans la moindre nécessité de se plaindre de cette situation. Toutes ces conditions réunies sont propices à une vie insalubre et une dégradation du logement dans lequel vivent les personnes atteintes du syndrome de Diogène. Dans un très grand nombre de cas, ce syndrome apparaît après un choc psychologique comme le décès d’un proche ou un changement radical de situation. Il touche essentiellement les personnes âgées.
Comment reconnaître une personne atteinte du syndrome de Diogène ?
Prévalence : Qui est touché par le symptôme ? Existe-t-il un profil type ?
Généralement moins fréquent chez les jeunes, il touche plus souvent les personnes âgées avec une moyenne d’âge qui varie entre 70 et 80 ans. Il touche majoritairement des personnes qui vivent seules et surtout des femmes. Avec une plus grande espérance de vie que les hommes, elles survivent généralement à leur conjoint. C’est d’ailleurs souvent après un choc psychologique comme le décès d’un proche que le syndrome se révèle.
Comment détecter cette maladie ?
Par ailleurs, il existe plusieurs façons pour détecter la personne victime de ce syndrome. Voici les principaux facteurs :
- On peut observer une négligence excessive de son hygiène corporelle ainsi que la malpropreté de son logement. Même entouré de saletés ou de détritus dans son lieu de vis, elle reste toujours indifférente. Il peut s’agir de garder ses poubelles dans son logement, de conserver les emballages de nourriture, des journaux et revues, de la vaisselle, des vêtements, des appareils hors d’usage, des animaux (animal hoarding), ou même, dans des cas extrêmes et finalement rares, ses propres excréments.
- Une relation inhabituelle vis-à-vis des objets. On distingue alors deux cas : le « Diogène actif » qui aime collecter des objets très divers comme les boites, les journaux ou tout autre objet et le « Diogène passif » qui par procrastination à cause de son état dépressif cesse de ranger et de nettoyer son habitation. On trouve alors une accumulation de déchets, d’aliments, voire même d’excréments.
- La personne concernée se trouve dans un fort isolement social. Elle n’arrive plus à nouer de relation avec voisinages ou sa famille. Elle se pense incomprise et rejetée, et ne doute pas de son choix. Elle refuse toute aide venant de l’extérieur car, bien souvent, personne ne peut entrer dans son foyer.
TOC, accumulation compulsive, syllogomanie, Diogène : comment les différencier ?
Il est parfois très difficile de différencier tous ces troubles du comportement tellement les nuances peuvent être minces voire poreuses. Le syndrome de Diogène a la particularité de rassembler tout ou en partie des symptômes des autres troubles, de manière même contradictoire parfois. Il peut être à la fois considérer :
- comme un TOC, pour le côté obsessionnel qui provoque des pensées angoissantes récurrentes et de l’anxiété ;
- comme un type d’accumulation compulsive ou de syllogomanie pour cette tendance excessive à accumuler les objets mêmes s’ils paraissent sans valeur marchande ;
- comme de l’ascétisme pour l’apparence austère et frugale de certains aspects de leur vie ;
- comme un trouble d’anxiété sociale pour leur relation à autrui.
Comment s’appelle la maladie des gens qui gardent tout (ou qui ne jettent rien) ?
Les personnes qui conservent tout, y compris des objets inutiles et sans valeur, s’appelle la syllogomanie. Ce trouble comportemental dont le nom vient du grec ancien : σύλλογος / súllogos qui signifie « rassemblement » est parfois appelé « thésaurisation pathologique » ou collectionnisme. Cette accumulation compulsive et excessive de n’importe quel type d’objet comme des vêtements, des journaux, de la vaisselle ou encore des appareils hors d’usage est un des critères régulièrement observés chez les cas de personnes atteintes du syndrome de Diogène.
Comprendre le syndrome de Diogène
Pourquoi dit-on syndrome de Diogène ?
La toute première étude sur le sujet a eu lieu en 1966 par Mac Milan et Shaw, deux psychiatres anglais mais ce n’est qu’en 1975 que le nom « syndrome de Diogène » sera rendu public à la suite d’une publication de trois gériatres britanniques Anthony Clark, Ganesh D. Mankikar et Ian Gray. Cette dénomination est emprunté à Diogène de Sinope, un philosophe grec du IVème siècle av J-C, dont l’objectif était de vivre au plus près possible de la nature afin d’accéder à une plus grande liberté matérielle et mentale, le menant à un mode de vie à l’envers et à l’encontre toutes les conventions sociales. D’autres préféreront utiliser des expressions différentes comme le psychiatre et aliéniste Ernest Dupré, qui parle de « mendiants thésauriseurs » dans un des premiers articles sur le sujet, par ou en France en 1913 ou bien de « syndrome de Pluchkine », une référence au personnage syllogomane du roman Les Âmes mortes de l’écrivain russe Nikolaï Gogol ou encore de hoarding ou « accumulation pathologique » (Dervinos-Hodbert et al., 2001).
Pourquoi certaines personnes accumulent ?
Il est très difficile de répondre précisément à cette question car la prévalence n’est pas si homogène. On constate néanmoins que ce type de comportement est souvent associée à une autre maladie psychiatrique. « Il peut s’agir d’un syndrome d’Alzheimer[…] ou d’un syndrome schizophrénique, obsessionnel ou phobique dans les pathologies psychiatriques » souligne le psychogériatre Jean-Claude Monfort. Dans un très grand nombre de cas, la cause initiale est issue d’un traumatisme vécu dans la petite enfance. Séparation, disparition, décès ou changement brutal de situation sont des facteurs de risque.
Peut-on « attraper » le syndrome de Diogène ?
Comme nous venons de le voir, c’est souvent un choc psychologique intense et brusque qui est à l’origine du syndrome de Diogène mais l’origine se situe bien souvent en amont, lors de la petite enfance.
Que faut-il faire pour appréhender ce trouble comportemental ?
De nombreuses hypothèses ont été évoquées pour mieux expliquer la situation. Quelles en sont les causes et les circonstances et quelles sont les conséquences pour le patient et son entourage (famille, voisinage, etc.) ? Comment appréhender ce trouble encore si méconnu ? Doit traiter les patients comme on le ferait pour une maladie plus commune ou doit-on adapter la réponse et la situation médico-sociale ?
Que faire ? Comment aider une personne atteinte du syndrome de Diogène ?
Prise en charge et éthique
Face à une telle situation médico-sociale, la question qui se pose à tout le monde et notamment aux services médicaux est la suivante : s’agit-il d’une réaction pathologique ou d’un choix de vie ? La loi française n’oblige pas les médecins à intervenir à toute personne qui jouit de sa pleine capacité. Il faut toujours respecter la liberté d’autrui. Mais, existe-t-il des limites ? À quel moment les médecins interviennent-ils ? Puisque la majorité des personnes atteintes vivent dans le déni, la démarche doit être rigoureuse, cohérente et il faut surtout agir avec une bonne tactique. Une mauvaise démarche pourrait causer des conséquences irréversibles chez le patient, donc il faut agir avec prudence. Lui forcer de sortir de son trou n’est pas une bonne décision, il faut l’approcher avec délicatesse et à l’amiable. Il faut avant tout réaliser une étude médico-sociale au sein de la famille. Il faut prendre contact avec le médecin qui s’occupe de la personne, puisque c’est lui qui connaisse mieux la situation. Avant de prendre une décision, il est obligatoire de se rendre dans le logement afin d’en tirer un maximum d’information. Dans le cas où le patient refuse les aides proposées par les médecins, il est donc nécessaire de lui créer un espace relationnel pour nouer la confiance avec lui. Il faut tenter de lui faire prendre conscience des avantages d’une vie en communauté et le soutenir au mieux psychologiquement afin qu’il puisse redresser la pente et oublier progressivement son état mélancolique.
Soutien et aide
Malgré une réticence forte à être épaulé et aidé, les personnes atteintes du syndrome de Diogène, syllogomanes et autres « mendiants thésauriseurs » ont d’autant plus besoin de soutien et d’aide.
Face à cette situation médico-sociale, la loi n’oblige pas les médecins ni le corps médical dans son ensemble à intervenir, c’est pourquoi l’approche psychologique d’une prise en charge, si elle est primordiale et nécessaire, s’avère aussi délicate et complexe…
Nettoyage après Diogène
Pour des raisons évidentes de sécurité et d’hygiène, aussi bien pour le patient que pour son voisinage, il est impératif de ne pas laisser les personnes atteintes du syndrome de Diogène ou de syllogomanie dans les conditions de vies qu’elles se sont construites année après années. L’intervention de professionnels du nettoyage après Diogène est impérative mais n’est qu’une étape du long processus de réhabilitation des personnes concernées…
Suivi personnalisé
Après avoir correctement identifier le syndrome et avoir réussi à entamer un contact, c’est une démarche longue et complexe qui s’entame comme le souligne parfaitement Émilie GUITARD et Igor KRTOLICA à travers leur article sur le sujet. Face à cette mise à l’écart spontanée de la société que Furtos qualifie d’« auto-exclusion », les proches comme les professionnels sont confrontés à de multiples questions éthiques : comment aider à la prise de conscience de la situation ? Quelle légitimité à agir ?
Les autres troubles du comportement qui peuvent être parfois confondus avec le syndrome de Diogène :
Syllogomanie
La syllogomanie est un terme peu connu qui regroupe les personnes ayant un trouble sévère d’accumulation compulsive. Découvrez ce que cache ce comportement excessif vis à vis des objets.
Incurie
Si l’incurie est au départ un abandon total des conventions sociales, il est aujourd’hui surtout synonyme de négligence extrême, que ce soit pour soi-même ou pour son logement.
Syndrome de Korsakoff
Le Syndrome de Korsakoff ou de démence de Korsakoff (encore appelé parfois syndrome amnésique) est un trouble neurologique très handicapant qui se caractérise par des oublis importants dus à des lésions irréversibles au niveau de certaines régions du cerveau.