Le syndrome de Diogène est principalement caractérisé par une accumulation excessive d’objets jusqu’à l’atteinte d’une forte insalubrité du logement dans les pires cas. Cependant, les symptômes associés vont bien au-delà d’une simple négligence. Derrière ce trouble de la santé se cachent d’autres troubles tels que la schizophrénie. Bien que distinctes, ces maladies peuvent parfois se manifester conjointement.
Quelles sont les causes du syndrome de Diogène ?
Sauf dans le cas un peu particulier de la syllogomanie, le syndrome de Diogène se manifeste par une négligence extrême de soi-même et de son environnement. Les patients font preuve d’un total déni de leur situation qu’ils vivent sans gêne. Ils refusent toute aide extérieure qui, pour eux, menace leur tranquillité.
Mais qu’est-ce qui conduit une personne à l’accumulation d’objets, au retranchement loin de ses proches et à un état d’incurie parfois extrême ? Les causes du syndrome de Diogène sont encore mal connues. Toutefois, de multiples facteurs sont incriminés. Il faut distinguer :
- Le syndrome de Diogène primaire
- Le syndrome de Diogène secondaire
Le syndrome de Diogène primaire survient sans identification d’une pathologie sous-jacente. Il peut être associé à un retrait social prolongé ou une personnalité marquée par le repli sur soi ou encore la suspicion. La pathologie peut survenir après un traumatisme psychologique, le stress pendant une maladie ou après une affection mentale. Une perte douloureuse, des troubles de l’identité, la précarité sociale ou le manque de soutien social sont autant d’éléments déclencheurs.
Le syndrome de Diogène secondaire peut apparaître à la suite de troubles psychiatriques tels que :
- La dépression,
- Les troubles de l’humeur,
- Le trouble obsessionnel compulsif,
- Les troubles addictifs,
- Les troubles psychotiques.
Des maladies telles que les troubles neurodégénératifs, les troubles génétiques et les lésions cérébrales peuvent favoriser l’apparition du syndrome de Diogène. Il en est de même de la maladie d’Alzheimer, la maladie à corps de Lewy, la maladie de Parkinson ou le syndrome de Prader-Willi.
Schizophrénie : un trouble psychotique complexe
La schizophrénie est un ensemble de troubles, modifiant la pensée et la perception de la réalité. Cette maladie mentale affecte également le comportement, les émotions et la cognition.
Il existe plusieurs types de schizophrénie :
- Paranoïde : elle est caractérisée par une croyance complotiste, une jalousie paranoïaque, des délires de grandeur et une confusion entre réalité et imaginaire.
- Hébéphrénique (ou désorganisée) : elle est marquée par un comportement inapproprié, une réflexion irrationnelle. les patients peuvent pleurer en écoutant une blague drôle ou rire en ressentant la douleur.
- Catatonique : elle se manifeste par des perturbations motrices allant de l’immobilité ou stupeur à l’écholalie, une répétition des paroles ou l’échopraxie, l’imitation répétitive de mouvements.
- Indifférenciée : les patients ne présentent aucune des caractéristiques des types sus-cités, mais présentent des limitations fonctionnelles. Il peut s’agir d’une négligence, de l’hygiène corporelle, de troubles de la pensée ou d’un confinement social.
- Résiduelle : lorsque le patient n’affiche que des symptômes mineurs au moment du diagnostic.
Un patient souffrant de cette pathologie est généralement en proie aux idées délirantes. Il peut présenter des délires de persécution, des hallucinations auditives et visuelles. La maladie se manifeste aussi par des discours incohérents, un comportement chaotique, des mouvements anormaux ou une absence de réaction. Certains présentent des pensées illogiques ou un manque de motivation pour la vie. Dans d’autres cas, il peut s’agir d’un mélange de plusieurs symptômes sans prédominance claire.
Avec ces manifestations, les patients voient leur vie totalement chamboulée. Maintenir les relations sociales devient difficile. La conservation d’un emploi, la gestion des activités de la vie courante, la prise de décisions ou la vie de manière autonome est entravée par les troubles cognitifs.
Liens entre le syndrome de Diogène et la schizophrénie
D’après différentes études, 30 à 80 % des personnes atteintes de Diogène vivant en insalubrité dans leur logement présentent des troubles psychiatriques. Plusieurs mécanismes sous-jacents peuvent expliquer cette situation :
- Isolement social extrême : les difficultés relationnelles induites par la schizophrénie et la stigmatisation liées à cette maladie mentale peuvent entrainer un isolement social important. Les patients perdent peu à peu leur intérêt pour l’activité sociale, ce qui favorise l’apparition du syndrome de Diogène.
- Altérations cognitives : les troubles cognitifs présents dans la schizophrénie peuvent causer une incapacité à organiser l’espace dans la maison. Une personne agitée et sujette aux hallucinations ne peut gérer correctement son hygiène personnelle et son logement. Ces problèmes peuvent conduire à une négligence progressive et à l’accumulation d’objets.
- Déni des besoins fondamentaux : les patients schizophrènes souffrent de troubles de la perception, de manque de motivation ou de perte de contact avec la réalité. Cela peut les amener à mal reconnaître ou à négliger leurs besoins essentiels comme l’alimentation, l’hygiène corporelle et le maintien d’un environnement sûr.
En raison de ces facteurs, le syndrome de Diogène pourrait être une conséquence de l’évolution de la schizophrénie. Par ailleurs, les deux maladies pourraient partager des facteurs de vulnérabilité communs. Les traumatismes infantiles, les difficultés socio-économiques, la perte d’un être cher et d’autres événements stressants augmentent le risque de développer les deux troubles.
Certains médicaments antipsychotiques utilisés pour traiter la schizophrénie pourraient avoir des effets secondaires. Il s’agit entre autres de la fatigue, de la somnolence et du manque de motivation. Ceux-ci pourraient contribuer à la négligence et à l’isolement associés au syndrome de Diogène.
Symptômes combinés : une double peine pour les patients et leurs proches
Lorsque le syndrome de Diogène et la schizophrénie se manifestent simultanément, les défis pour les patients et leurs familles sont amplifiés. Le cas d’une femme au foyer de 46 ans, diplômée du MCA P1L1 en est un bel exemple. Avec un historique de 7 ans de repli sur soi, 2 ans de comportements de ramassage et de thésaurisation des déchets, elle a également développé de la méfiance et des comportements désorganisés.
L’impact sur la qualité de vie et la santé globale est significatif, car cette combinaison peut favoriser des conditions de vie extrêmement précaires. Les personnes atteintes sont exposées à des risques d’infections, à des maladies dermatologiques, à la malnutrition et aux intoxications. De plus, le confinement prolongé à la maison et l’absence d’aide peuvent aggraver les symptômes des individus schizophrènes. Par ailleurs, l’encombrement excessif d’un logement peut provoquer des incendies, des chutes et des problèmes avec le voisinage.
Pour les familles, la situation est souvent incompréhensible et crée une véritable souffrance mentale. Elles font face à la stigmatisation, au regard dur des autres qui associent ces troubles à un manque de volonté plutôt qu’à une maladie. En outre, il peut être difficile de trouver des professionnels de santé compétents et disponibles pour prendre en charge ces troubles complexes. De plus, les personnes atteintes refusent toute aide, un comportement qui complique davantage la situation.
Que faire pour aider une personne atteinte du syndrome de Diogène ?
La prise en charge repose sur une approche pluridisciplinaire. Elle nécessite la mise en place d’une approche médicale, psychologique et sociale.
- Approche psychologique : établir une relation de confiance avec patience est la première étape pour aider un proche atteint du syndrome. Commencer un nettoyage brusque ou le forcer à se rendre à l’hôpital peut créer un stress supplémentaire et une récidive rapide. En prenant en compte la vulnérabilité de la personne, sans la juger ou la culpabiliser, il est possible de lui faire accepter l’aide et quitter l’état d’incurie. Un soutien psychologique l’aidera aussi à faire face aux difficultés émotionnelles liées au syndrome de Diogène.
- Approche médicale : consulter un médecin pour une évaluation psychiatrique approfondie est nécessaire pour identifier les troubles mentaux potentiels associés et orienter le traitement. Les soins incluent généralement des antipsychotiques, des antidépresseurs ou des anxiolytiques pour réduire les symptômes psychotiques. La négligence de l’hygiène corporelle et du domicile peut entraîner divers problèmes de santé physique. C’est le cas de l’hyperkératose dont souffrait ce jeune homme de 34 ans atteint de Diogène. Des soins supplémentaires devront être prodigués en fonction de l’état physique des patients.
- Approche sociale : renforcer le lien social à travers l’implication dans des activités en groupe change la vie des patients. La famille, les amis, les voisins doivent apporter leur soutien social pour rompre le besoin d’isolement et améliorer l’état des individus.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier la nécessité de faire appel à une entreprise de nettoyage professionnelle pour assainir la maison. En réalité, cet accompagnement pluridisciplinaire se révèle pertinent pour assurer une prise en charge globale et coordonnée. Il permet aux patients schizophrènes atteints de syndrome de Diogène de bénéficier d’un suivi régulier, une intervention progressive pour améliorer leur qualité de vie.
Le syndrome de Diogène et la schizophrénie, lorsqu’ils sont simultanés, créent une détresse humaine et sociale profonde. Les liens entre ces deux maladies sont encore mal connus, bien qu’elles présentent des similitudes de facteurs déclencheurs et des conséquences complémentaires. Seule une prise en charge globale et bienveillante peut apaiser les personnes atteintes.
Sources :
- https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/82-619-m/2012004/sections/sectiong-fra.htm#a1
- https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/39350614/
- https://www.researchgate.net/publication/385709381_Schizophrenia_with_Diogenes_Syndrome-_A_Case_Report
- https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC3572640/